Rédaction professionnelle #08 – Les procédés de vulgarisation

Vulgariser un texte, c’est l’adapter à un public de non-initiés afin que le plus grand nombre de lecteurs puissent le comprendre, quel qu’en soit le contenu. Par exemple, les textes administratifs doivent être adaptés au grand public ; les textes juridiques, le jargon administratif, les termes techniques peuvent constituer des obstacles sérieux à la compréhension.

Leur transposition en langue courante peut alors permettre de franchir ces obstacles en recourant à des techniques de vulgarisation. L’équivalence, la définition, l’explication et l’illustration sont les outils à retenir pour faire comprendre le message au lecteur.

L’équivalence

L’équivalence est en quelque sorte une « traduction ». Ce procédé consiste à remplacer un terme technique, spécifique ou rare par un mot courant, simple, accessible : ce peut être un synonyme plus connu du lecteur ou un terme générique. Par exemple, on dira d’un freelance qu’il est aussi appelé autoentrepreneur. L’emploi d’une expression équivalente est utile pour rattacher le terme à une ancienne appellation, plus connue du lecteur : l’IUFM a rappelé pendant des années qu’elle était désormais devenue l’ESPE…

De la même manière qu’un médecin peut parler d’hématome ou de bleu, de céphalées ou de maux de tête, il faut choisir d’utiliser la langue technique ou la langue courante selon le destinataire auquel on s’adresse. Il faut alors avoir une idée préalable de ses compétences linguistiques. Il faut aussi être capable de repérer les termes techniques, ce qui n’est pas toujours facile, d’autant plus qu’un mot de langue courante peut avoir un sens technique. Il suffit de penser au terme conjoint dans la vie quotidienne et de voir sa définition dans le domaine juridique. Aussi, dès que le rédacteur soupçonne qu’un mot relève d’un domaine spécialisé, il a avantage à le remplacer par un mot plus courant. S’il décide de le garder, il devra l’expliquer. Ainsi :

  • une demande péremptoire peut devenir une demande sans appel ou une dernière demande avant sanction ;
  • les arrérages de la pension alimentaire : les sommes qui auraient dû être remboursées ;
  • un déficit anatomophysiologique comprenant un pourcentage pour bilatéralité : une faiblesse physique qui touche les deux côtés du corps.

La définition

Lorsqu’il est préférable de conserver le terme technique ou spécifique au domaine, il faut alors s’assurer que le lecteur le saisira. Le recours à la définition est une des techniques les plus efficaces pour garantir la compréhension d’un terme. Cette stratégie consiste à glisser dans une phrase la signification du terme employé ou à la livrer telle quelle, de façon à permettre au lecteur d’appréhender facilement la notion à laquelle le terme renvoie. La définition est habituellement totale, mais elle peut être partielle si elle renseigne le lecteur sur un trait spécifique de la notion.

Devant certains mots spécialisés, le lecteur peut se sentir désemparé. Si le rédacteur tient à garder le terme technique, il lui accolera alors la définition ou une reformulation de la définition qu’il trouvera dans un dictionnaire terminologique idoine.

L’adaptation de la communication destinée au lecteur ne doit pas être entravée par la nécessité d’utiliser des termes techniques. La définition d’un terme peu courant permet au lecteur de comprendre exactement le sujet de la communication et conserve au texte sa teneur spécifique, grâce au maintien de termes obligatoires.

Avec une bonne définition et un fusil de sniper, vous toucherez au but.

L’explication

L’explication est un procédé à privilégier en tout temps pour que le lecteur et la lectrice aient le maximum de chances de bien comprendre le message qui leur est transmis. Moins figée que la définition, l’explication peut s’appliquer à tous les termes ou expressions complexes, même à ceux ou celles qui ne sont pas proprement techniques.

Dans la lettre suivante, grâce à l’explication donnée, le ou la destinataire peut bien comprendre ce qui lui est proposé et faire un choix éclairé. En effet, sans l’explication sur la capitalisation en fonction de sa propre situation, le lecteur aurait dû faire des recherches ou demander un surplus de renseignements.

[…] Vous signerez alors le formulaire Entente de remboursement et aurez deux possibilités relativement au solde des intérêts dus le [date] :

– vous pourrez les payer intégralement ou en partie ;
– vous pourrez les capitaliser, c’est-à-dire que votre établissement financier l’ajoutera à votre dette […].

L’explication est ici judicieuse, claire et personnalisée. Elle devrait avoir une place de choix dans les textes administratifs. Elle a le mérite de clarifier des situations en présentant les faits de manière accessible. L’explication des termes techniques à l’aide de mots simples qui en explorent les différentes facettes est un outil précieux. Le destinataire peut alors mieux comprendre l’objet de la communication et agir de manière appropriée.

L’exemple ou l’illustration

Bien qu’il soit parfois difficile à insérer dans un texte administratif, l’exemple permet d’illustrer des situations complexes, de proposer des scénarios qui présentent plus concrètement des descriptions un peu abstraites.

Par exemple, un exemple. Dans le texte suivant, une illustration aurait été judicieuse pour bien comprendre l’énoncé de la loi.

En vertu de l’article 53 de la Loi […], lorsqu’une personne redevable d’un montant exigible en vertu de ladite Loi est aussi créancière ou bénéficiaire d’un montant payable par un organisme public, le ministre peut affecter la totalité ou une partie de ce montant au paiement de la dette de cette personne.

Seul, ce texte demande un effort d’imagination. Des exemples de situations permettraient de mieux le comprendre.

Par exemple, si le ministère de [.. .J vous verse chaque semaine un montant de 200$ en raison d’un accident de travail, le ministre peut prendre toute cette somme, ou une partie, pour payer votre pension alimentaire.

Ou bien, si vous remboursez une dette d’études, le montant de chaque remboursement peut aussi être utilisé d’abord pour le paiement de cette pension.

L’exemple devrait être utilisé lorsque les difficultés ne résident pas dans le vocabulaire, mais dans les situations décrites. Si des dates, des alternatives, des méthodes, des délais sont proposés, au moins un scénario devrait être présenté.

Une autre manière de concrétiser des notions consiste à recourir à l’énumération. Cette stratégie fournit des exemples connus du destinataire, qui servent à expliciter le terme ou l’expression difficile à comprendre. Ainsi, on définira ce qu’on entend par abus psychologique en faisant appel à des exemples mis entre parenthèses : (menaces, humiliation, isolement, intimidation, etc.).

Conclusion

  • dès qu’un terme technique ou un mot savant peut provoquer une incompréhension ou entraver la lecture, il convient de le « traduire » en un mot courant.
  • S’il est nécessaire de le garder pour des raisons légales ou autres, il sera suivi de son équivalent, d’une explication, d’une définition ou d’une illustration.
  • Cela démystifiera certains champs de la connaissance réservés jusqu’alors aux experts et donnera au lecteur la possibilité de comprendre le contenu réel des communications qui lui sont adressées.

En espérant que cela vous aidera, je vous dis :
à plus tard… au plus tôt !

Rémi L.

Source :  Isabelle Clerc, Éric Kavanagh (2006).
De la lettre à la page Web
: savoir communiquer avec le grand public. Université Laval. Groupe Rédiger.

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