Question de langue #24 – « ce qui » et « ce qu’il »

La bourde

Juliette a passé une mauvaise journée : deux vomis et un incendie, elle n’imaginait pas comme ça un rendez-vous chez la pédicure. Croisant son colocataire qui lui demande si elle a passé une bonne journée, elle répond exténuée :

« Ce qui me faut, c’est des vacances. »

Hélas non.

Juliette (reconstitution), rageant contre les dérives de l’oralité et le manque de congés.

La règle, ses sous-règles et des exemples idoines

On peut facilement se perdre dans les usages de « ce qui » et « ce qu’il », ces deux tournures étant souvent interchangeables. Une dessiccation s’impose :

  • Ce quicorrespond à une construction de type sujet / verbe dans laquelle une situation ou un événement (remplacé par ce qui) est sujet réel. Cette situation ou cet événement peut avoir été décrit avant, précisé après, ou être traité comme une ellipse (Ce qui se passe est inquiétant = cette situation est inquiétante).
  • Ce qu’ilest une construction impersonnelle du type il se passe (comme il pleut) combinée au gallicisme (construction propre au français) Ce … que (Je l’ai vu = c’est lui que j’ai vu).

La similarité des deux constructions provient du fait qu’assez souvent, dans l’une ou l’autre, l’élément qui ou qu’il n’est pas explicité. Pour ce qui est des verbes et expressions autorisant les deux usages, on conseillera l’euphonie (du latin euphonia, « succession d’harmonie de sons dans un mot, une phrase »).

Cette présentation terminée, rentrons dans le vif du sujet !

Les verbes impersonnels

Lorsque l’on a un verbe dit impersonnel (c’est-à-dire un verbe qui ne s’utilise qu’à la troisième personne du singulier, comme falloir), on dira toujours ce qu’il.

  • Avant de sauver le monde, je vérifie toujours si j’ai tout ce qu’il me faut.

À noter : même s’il est courant en langage familier de prononcer « ce qui me faut« , l’écrire ainsi constitue une faute grammaticale. Vous voilà prévenu(e), bande de bandits.

Le verbe « rester »

Avec le verbe rester, on peut employer indifféremment ce qui ou ce qu’il.

  • Il me reste beaucoup de choses à dégonder. Voici ce qui me reste à dégonder. (ou : voici ce qu’il me reste à dégonder)
  • Je dois calculer combien d’argent il me reste. Voici ce qui me reste d’argent. (ou : voici ce qu’il me reste d’argent)

Les verbes « se passer », « se dire », « arriver », « pouvoir », « advenir », « prendre », « résulter », « convenir »

Avec ces verbes, la tournure impersonnelle ce qu’il est fréquente, bien que l’on puisse également utiliser ce qui.

  • Le séquoia a pris vie : que se passe-t-il ? Tout le monde se demande ce qu’il se passe / ce qui se passe.
  • Pierre ne se doutait pas de ce qu’il se passait / de ce qui se passait.
  • Qu’est-ce qu’il arrive à Dark Maul ? / Qu’est-ce qui arrive à Dark Maul ?
  • Lucie ne sait pas ce qu’il lui arrive / ce qui lui arrive.
  • Face à une loutre, je te recommande de faire ce qui convient / ce qu’il convient [de faire].
  • On se demande bien ce qu’il lui a pris / ce qui lui a pris.

De ce qui précède, vous pouvez considérer les interrogations qu’est-ce qu’il et qu’est-ce qui (« Qu’est-ce qui/qu’il se passe ? ») comme équivalents et admissibles dans la langue courante. Dans la langue soignée, on préférera cependant la tournure impersonnelle avec inversion du sujet sous cette forme : « Que se passe-t-il ? ».

Le verbe « plaire »

Avec le verbe plaire, il faut distinguer la tournure personnelle (« ce pachyderme me plaît ») de la tournure impersonnelle (« il me plaît d’aller pomper tous les dimanches »). 

Avec la tournure personnelle, on emploiera ce qui.

  • Choisissez le veuf qui vous plaît : choisissez ce qui vous plaît.

Avec la tournure impersonnelle, on emploiera ce qu’il.

  • Avant de vous en débarrasser, vous ferez ce qu’il vous plaira de faire. 

L’expression « sembler bon »

Avec l’expression sembler bon, on peut employer indifféremment ce qui ou ce qu’il.

  • Dans cette hacienda, le personnel fait ce qui lui semble bon de faire. (ou : ce qu’il lui semble bon de faire)

Toutefois, avec l’inversion fréquente de bon, on emploie non pas ce qui ou ce qu’il, mais bien ce que.

  • Ces employés font toujours ce que bon leur semble, peut-être est-ce pour cela qu’ils font tant de prison…

En espérant avoir fait la lumière sur toute cette affaire, je vous dis :
à plus tard… au plus tôt !

Rémi L.

Sources : Druide

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