L’hésitation
Par une curieuse distorsion temporelle, on vous demande en novembre comment se sont passés vos congés estivaux. N’en ayant pas pris mais souhaitant rabattre le caquet et l’outrecuidance de votre interlocuteur, vous baratinez :
C’était / c’étaient de super vacances ! J’étais avec des copines, c’est / ce sont elles qui ont tout payé et après j’ai gagné au loto deux fois sans les mains.
Au moment de lui répondre, vous vous rappelez cependant que cette personne est professeur de français… Indécis(e), vexé(e), contrit(e), vous vous contentez d’un « ça va c’était cool » en regrettant de ne pas travailler au Club Med.

La règle, ses sous-règles et des exemples idoines
Le présentatif C’EST, que l’on met rarement au pluriel à l’oral, constitue une source d’hésitation à l’écrit lorsqu’il est suivi d’un nom ou d’un pronom pluriel. En fait, souvent, le singulier et le pluriel sont tous deux acceptés, même si le pluriel est plus recherché. Toutefois, dans certains cas, le singulier est préférable… voyons ça en détail !
Devant un substantif pluriel
Devant un substantif pluriel, on utilise généralement la forme plurielle. On trouve aussi parfois le singulier ; cette forme est tolérée, mais elle est considérée comme plus familière. Il est donc préférable de l’éviter dans les textes de style soutenu (turlututu).
- Ce sont ces dames qui sont arrivées les premières pour le concours de bras de fer.
- Ce sont des champignons vénéneux, ils compléteront l’omelette.
- C’étaient des hypothèses plausibles, même si je trouve que tu as pressé la détente un peu rapidement.
- C’est les parents d’Henri ; tu les connais ? Lui non plus, il a été adopté.
Lorsque CE reprend un nom ou un pronom au singulier qui le précède et qu’il est suivi d’un ou de plusieurs noms au pluriel
Lorsque CE reprend un nom ou un pronom au singulier qui le précède et qu’il est suivi d’un ou de plusieurs noms au pluriel, il est également préférable d’utiliser la forme plurielle. Bien que le singulier se rencontre parfois à l’écrit, on l’évite dans la langue soignée.
- L’été au bord du fleuve, c’étaient les vacances, les nudistes, les impasses mexicaines…
- Tout cela, ce ne sont que mes propres réflexions.
- L’école, ce sont les devoirs, les examens et les échecs scolaires.
Devant les pronoms EUX et ELLES
Devant les pronoms EUX et ELLES, le pluriel est conseillé. Mais le singulier est courant dans ce cas, surtout dans les constructions négatives et interrogatives. Par contre, devant les pronoms NOUS et VOUS, le singulier est de rigueur.
- Ce sont elles qui ont remporté l’épreuve vu qu’il n’y avait pas d’autres concurrents.
- C’étaient eux qui avaient appelé la police lorsque nous faisions un karaoké.
- Je me demande si ce n’est pas elles qui m’ont accueilli la semaine dernière en psychiatrie.
- C’était vous qui aviez raison, dommage… c’est nous qui allons devenir riches désormais !
Lorsque C’EST introduit une énumération et que le premier mot de cette énumération est singulier
Lorsque la locution C’EST introduit une énumération et que le premier mot de cette énumération est singulier, on laisse souvent la locution au singulier, mais le pluriel est aussi possible. Par contre, si cette énumération explique un mot qui précède, il vaut mieux utiliser le pluriel.
- C’est la gloire et la célébrité qui l’attirent dans la pétanque professionnelle.
- C’était la joie de vivre et le sens de l’humour qui caractérisaient le mieux mon père. Son épitaphe est d’ailleurs une blague salace.
- Ce sont l’espoir, la confiance et la détermination qui lui permettent de continuer ses démarches administratives.
- Il y a cinq grands lacs en Amérique du Nord ; ce sont le lac Ontario, le lac Érié, le lac Huron, le lac Michigan et le lac Supérieur. Je n’ai souillé que trois d’entre eux.
Lorsque C’EST introduit une quantité et qu’il est suivi d’un nombre
Lorsque C’EST introduit une quantité et qu’il est suivi d’un nombre, on le laisse habituellement au singulier. Le pluriel est toutefois acceptable lorsqu’on veut mettre l’accent sur la pluralité exprimée par le nombre.
- C’est sept heures qui sonnent au clocher.
- C’esthuit mois qu’il doit attendre avant de refaire sa carte étudiante.
- C’était cent dollars que j’avais gagnés, avant que ma grand-mère ne me rouste au poker.
- Ce sont quatre longues années que je devrai vivre sans lui : j’ai hâte !
Lorsque C’EST est suivi d’une préposition et d’un nom ou d’un pronom.
On utilise uniquement le singulier lorsque C’EST est suivi d’une préposition et d’un nom ou d’un pronom.
- C’est par ses amis qu’il a appris la triste nouvelle : son record à Singstar est tombé.
- J’aime bien les concepteurs-rédacteurs ; c’est avec eux que j’aimerais travailler.
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En espérant avoir fait la lumière sur toute cette affaire, je vous dis :
à plus tard… au plus tôt !
Rémi L.
Source : OQLF
Merci pour vos explications. On entend trop souvent l’emploi de c’est quand il paraît évident qu’il faut dire ce sont. Le langage devient lourd, gauche, impropre.
Cordialement. DS