Nouvelle année, nouvelles vacances entre amis… et quelques lignes pour rendre compte de toute cette vie qui s’agitait cette semaine-là.
Samedi 13/08/2016 : Marseille – Bilbao
Il est venu ! Le temps des vacances estivalo-amicales s’abat sur notre contrée, pour notre réjouissance. Mais d’ici à ce que l’équipage soit réuni, quelques et éparses équipées bravent les chemins.
Pistez le long des bretelles : vous tomberez sur Nico’, sur Sarah, Alex, Olivier et Juliette ! Intéressez-vous aux bas-côtés, car la « locamotive » de Nina n’est plus très loin… et si le ciel entrouvre ses longues jambes d’azur, alors entrapercevrez-vous Thomas, toussotant des nuages. Arnaud et Sophie, in fine, viendront amoureux car cela reste le plus beau moyen de transport.
Mais revenons à notre (dé)route, à ses axes en forme de fermetures éclair et de lacets. Dans la voiture, chacun reprend le fil de la vie d’autrui tandis que les guillemets blancs, au sol et sans mot dire, témoigne du temps qui passe. Ca rit aux éclats et aux arrêts d’autoroute pour pester ensuite contre les ralentissements, sur un faux air d’accordéon. Estimons-nous heureux pourtant car le paysage peint de tous ses verts et de tout son or les kilomètres ! Des distances il fait des odyssées, des heures des moments clefs… par intermittence, les véhiculés succombent aux siestes passagères, laissant la nature songeuse.
Au moment du déjeuner, nous mordons à pleine dent dans la frugalité. Assis, nos ombres sombrent et s’emmêlent avec le bitume… le ciel brille ; d’ici la fin de l’expédition, du soleil nous en connaîtrons un rayon. Mais pour le moment assomme-t-il joyeusement et à tour de rôle le frêle convoi.
Que dire de l’après-midi ? Une succession de démences que la chaleur ne cesse d’exciter, d’ici à ce que nos occiputs s’abrutissent définitivement.
Et puis, les Pyrénées. Un bras, un corps, un agrégat ! Tous crocs dehors, sa silhouette farouche garde les rebonds des prairies alentours. La vive verdure d’août dévale vallées et vallons sans que nous y trouvions un semblant d’explication… Le dépaysement est à nos portes ; un péage faiblard et schengennien s’oppose, sans succès, et l’Espagne lui succède.
A peine la frontière franchie, nous basculons dans un monde de précipices. Quelques premières bâtisses, union des falaises et des génies, méditent.
[…] Et bientôt, Bilbao. Bien vite, les arrivés comblent les morcellements : tout le monde y va de son anecdote, chacun de sa réjouissance. Les sacs se jettent sur le lit et nous voilà partis festoyer… une fois décrassés.
De là une première nuit ibérique, faite de tapas et de Nico (croisé à un ultime carrefour)… peut-être puis-je conclure là-dessus ? Une journée, des chevauchements, une chevauchée. Et nous pénétrons à nouveau dans les vies environnantes…
Samedi 14 août 2016 – Bilbao
Bilbao est un déroulement dont les espaces possèdent leur propre dimension. Où que nous allions, il y a de la place pour nous ; à quelles fins l’user ? Mystère… En attendant, nous nous faufilons parmi les petits immeubles de la ville et leurs inénarrables aspects.
Le premier des restaurants où nous échouons accueille nos sueurs, nectar d’un harassement général. Nous ne retînmes que le dessert, Arnaud et Sophie rejoignant l’équipage… La chaleur encore tonne le long des peaux, il nous faut rejoindre la côte.
[…]
C’est près d’un golfe que nous laissons les voitures. La plage est semblable à une foultitude d’autres, seuls les rebonds des collines alentours trahissent le lointain et l’exotisme. Et puis il y a ce brouillard qui lèche jusqu’au drapeau vert. Son intermittence saccade les lumières et s’abat sur les draps balnéaires, tandis que le vent pousse doucement derrière la marche du monde.
Nos corps dans le décor ne versent guère dans l’immobilité, en attendant. Ils courent, se baignent, s’ébrouent, semblables à des enfants. Quelques sabliers encore et tout se délite, pour laisser place à un tableau nouveau.
Ecourtons les douches et la longueur des protocoles pour directement sauter à un itinéraire plein d’errances : celui du restaurant ! Sans adresse véritable, la procession erre et se cogne, désespère mais s’en cogne. Dans un ultime pied-de-nez, nous nous tournons vers une royauté rivale déguster un gros et gras menu.
De la digestion, je retiens tant d’images, comme si la ville avait revêtu une robe de soir. Sur une place ou près d’un fleuve, les étincelles parcourent l’épiderme. Nos sens palpitent une dernière fois, dérivent, dérivent, tiraillés par des émois que seul un lit éteindra.
Lundi 15 août 2016 – Zirben/Castro Urdiales
Le convoi fait halte à Zirben, port que ne renierait pas Fos-sur-Mer. Un rapide tour nous laissant circonspects, nous nous jetons sur les quelques mets que vend un restaurateur. Il flotte une impression d’ailleurs.
La route vers Castro Urdalès est jonchée de chapiteaux naturels. Ceux-ci sont faits de roches, de terre et d’un sauvage gazon qui jure avec les chaleurs. Nous arrivons à la station balnéaire au moment probable d’une féria. La nature se change soudain en corps et en peaux ; hommes, femmes de tout âge bougent sourdement au rythme des beats et de la paillardise ambiante. Notre équipée se réfugie sur la digue puis sur les hauteurs pour – notamment – achever sa digestion.
[…]
Le terme « hauteurs » fait pâle figure quand on l’oppose aux falaises de Langres, atteintes plus tard dans l’après-midi. Avant d’arpenter ses plages en contrebas, nous suivons un petit sentier nous menant à l’une des extrémités. Le vent ici semble inspirer tout l’environnement par son bruissement ; voici que son harmonie me gagne. Tout se contemple, dans une paix infinie. Les orées recèlent au-delà des premiers bois quelques obscurités qu’un noir élégant s’empresse de peindre. La côte chuchote les vagues, comme un air de flûte qui inonde l’âme. Son roulis se trouve aussi dans les broussailles, il y crépite : les insectes scandent et scandent et scandent les vieilles gloires du paysage. Vers l’horizon, l’océan et le ciel se considèrent comme deux miroirs usés. Quelques-uns de leurs reflets bâtissent la beauté des vagues-vallées, aux sommets de neige et d’écume.
Mardi 16 août 2016 – Santander
Les jours ne cessent de se dépasser, et nos petits yeux mal éveillés ont bien du mal à prendre toute la mesure de leur journée. Une rencontre avec les viennoiseries de Santander, délicieuses et salutaires, préparent nos vaillances… il est midi, mardi commence !
La ville malgré la grisaille laisse échapper son histoire chaude et colorée, à mesure que nous arpentons ses chemins. Marchés et bâtiments maintiennent la grille des quartiers alors que nous alternons les phases ambulantes et d’autres plus… digestives. Le pique-nique (fort) tardif se déroule dans le parc royal, ceint de pelouses aux milles fatigues et d’un petit train ronronnant. La lumière et la chaleur y donnent l’impression d’avoir été dérobées par l’océan voisin ; momentanément, une vague sans éclat brise des corps au repos… mais déjà le vent se lève puis le camp, bercé par la ronde des allées et des alizés.
Un Palacio real de la Magdalena plus loin nous retrouvons l’horizon et son océan environnant. Une île et quelques bateaux stagnent à la surface huileuse, comme d’ultimes abandons. A cette mélancolie se joint celle des bêtes hispano-uruguayennes, déportées puis relâchées dans des contrées de fer cerclées. Cette animalerie propage dans nos cœurs une doucereuse agonie, le tout dans une ambiance de non-vie, à en questionner l’existence.
Heureusement la camaraderie trouve toujours un chemin : un mojito en terrasse, un plat goûté dans une bonne taverne ou encore un conte narré entre quatre lits. Ces moments cités et tus à la fois révèle toute l’importance de savoir poser sa plume au bon moment.
Mercredi 17 août 2016
Santander / Santillana del Mar / Ribadesella / Comillas / Covadonga
Quand les habitudes s’éloignent, la vacance est donnée ! Le tard et le décalage saupoudrent dès le matin chaque comportement, laissant aux événements une tournure aléatoire. De là, une impression de course de fond, où les étapes dépaysent… Bon, un dernier hommage à la double cathédrale de Santander avant de prendre congé. Ibères comme aujourd’hui, se poursuit la Cantabrie !
Au terme d’une quarantaine de routières minutes, nous atteignons Santillana del Mar, une petite ville fortifiée au potentiel touristique pleinement exploité… A croire qu’histoire et artisanat ne pouvaient perdurer que dans un mercantilisme navrant. L’église et son cloître méritaient pourtant une petite visite. Un lierre goinfre y observait les badauds tout occupés à scruter des tombeaux. Et les regards de caresser la brillance des roches, et les fois de serrer les cœurs de pierre. Cet instant, s’il ne fut payant, aurait pu être véritable ; le sort cependant ne fait pas dans la charité.
Nouvelle ville, autre donne : Comillas étend ses longues chaînes de touristes et alourdit la cadence. Après un goûter digne d’un déjeuner, nous nous offrons un caprice en accompagnant Gaudi jusque dans ses créations locales. L’œuvre est atypique, s’arpente telle une résolution, un accomplissement. Au sortir, c’est nous qui sommes traversés.
En quittant Comillas, la ville nous pleure. Elle s’épanche dans les nuages et les rivières, gonfle la brume pervenche. La lente bruine qui recouvre les bâtisses assiste, impuissante, à la poursuite de notre expédition. Ces brumes donnent un parfum britannique aux sommets des vallées ; la végétation relève ici davantage d’un éclatement de forêts et de buis… comme si les monts succombaient céans à quelque puissance verte.
Jeudi 18 août 2016
Covadonga / Parque nacional de los picos de Europa
L’auberge d’Andrés fait figure d’hospitalité dans ce monde de monts. En remontant la ria Covadonga, nous atteignons le village éponyme. Il y a des fers et de vieilles pierres, entourant un sanctuaire ; la majesté de l’ouvrage donnerait presque envie de bénir nos carlingues ! C’est cependant d’un bus dont nous aurons besoin pour atteindre Los Lagos, plans d’eau hauts de 1200m.
La texture des terres y est douce, sorte de pelouse rocheuse que nos pieds foulent, dans laquelle ils s’engluent, pendant que la brume grignote le paysage. Nous marchons d’abord aux côtés d’autres touristes avant de s’en détacher pour tenter notre propre chemin – bien que toujours balisé. Le vert semble la réponse à chaque couleur et chaque relief ; un vert quelquefois pointillé de bouses grâce au transit mesquin des bovins non loin. Le bord lacustre peint une surface pastel, en plus d’y coller quelques feuilles et des sentinelles aviaires.
A notre « arrivée », nous retrouvons le corps des touristes ; un petit et lourd chemin pierreux ouvre la voie jusqu’aux cars en contrebas. La nature et ses atours ont beau être tout autour, je ressens notre lien : il se distend, ses estampes s’estompant vers d’autres firmaments… Ah ! Comme j’aimerais écrire et veiller des odes et des aubes, pour que jamais ces brumes ne soient oubliées ! Mais nous faisons partie d’une autre sorte de transit et déjà ma conscience s’éloigne, assoupie en devenir sur un quelconque siège de cuir.
Au voyage succède la route et des villages la composent. Nous prenons le temps dans l’un d’eux, car dans moins d’un jour nous nous clairsemerons.
[…]
L’arrivée à San Sebastian est brouillonne, c’est en ogres que nous dinons ! Certains braves se risquent jusqu’au bar mais s’égarent au retour et rentrent une heure plus tard…. S’il résiste à nos manœuvres, de qui le temps est-il le jouet ?
Vendredi 19 août 2016 – San Sebastian/France
Le jour final apparaît par l’embrasure d’un rideau. Sa lumière à peine distrait l’équipage tout ému d’avoir retrouvé une literie. Hardi, compagnons ! San Se’ a fêté hier notre arrivée d’une jolie pétarade, nous lui offrirons un beau départ !
Mais avant, il faut prendre des forces. Dans une boulangerie, les papilles en éventail, nous profitons du fracas des tasses et des soucoupes ; goûts et arômes viennent par soupçon enorgueillir nos sens. Une fin de matinée sucrée donc, alors que l’on distingue sur le ton des confidences, quelques répliques d’ordre technique à propos du trajet retour.
La plage locale ne manque pas de sel ; nous affrontons l’océan par vagues, enragés et avec bien trop d’écume à la bouche. Âpres passages iodés après âpres passages iodés, la tête en bas et les pieds alertes, nous effectuons une retraite. S’ensuit une passe à dix à cinq où notre gaucherie régale l’espace balnéaire… Pas de doute : les JO sont bien à Rio ! Un dernier conte allongé sur le plage, « La Massue de Piquillo », finit de régaler notre imaginaire avant de définitivement lever le camp.
[…] Un peu plus tard et Thomas s’esquive : un autre enchainement l’attendprès de Madrid… Bises empressées et de vraies marques d’amitié pour la route, celles qui parent le soleil d’une lumière discrète mais supplémentaire. Le départ se poursuit et les bagages de se fermer une ultime fois pendant que s’ouvre les portières…
Les points de suspension percent et forent sans effort ma pensée. Il est temps de laisser ces souvenirs à la mémoire de ceux qui les vécurent.
Puissent ces proses fleurir
Les réminiscences à venir…
Teckhell